« Pour les Alliés, si la bataille de la ‘poche de Falaise’ a été un semi-échec, le franchissement de la Seine par l’ennemi en fuite apparaît cette fois comme un échec total » pourra écrire Jean Quellien[1]. Les Allemands en effet sont parvenus à évacuer 240 000 hommes et près de 30 000 véhicules, au grand étonnement des Alliés qui avaient détruit tous les ponts. Par son ampleur, sinon bien sûr par la largeur de la coupure à traverser, cette évacuation réussie en rappelle une autre, survenue quatre ans plus tôt. La retraite allemande sur la Seine partage le statut ambigu de l’évacuation de Dunkerque. Actant une grande défaite, les deux opérations sauvegardent des moyens pour continuer la lutte -long chemin vers la victoire, pour Dunkerque, prolongation de combats acharnés en vue de retarder une défaite inéluctable, pour le passage de la Seine.
Moins connue que les controverses sur la fermeture incomplète de la poche de Falaise, à l’origine d’un Stalingrad manqué en Normandie, cette histoire d’un Dunkerque sur la Seine mérite pourtant d’être revisitée.
La poursuite
Les dispositions pour les actions à mener après la fermeture de la poche de Falaise ont été arrêtées lors d’une réunion le 19 aout entre Montgomery, Bradley, Hodges, Dempsey et Crerar, mais en l’absence de Patton[2]. Le plan renouait avec l’idée d’un grand enveloppement, à laquelle Montgomery était resté attaché, malgré la diversion de « petit enveloppement », entre Falaise et Argentan, idée de Bradley à laquelle il s’était rallié sans lui donner une réelle priorité. Cet enveloppement serait effectué par deux corps américains, remontant de Mantes vers l’aval sur la rive gauche de la Seine, tandis que les Anglo-Canadiens repousseraient les Allemands vers la Seine, tout en se préparant à traverser le fleuve dans un secteur qui serait libéré par les Américains, entre Vernon et Rouen. Ainsi, écrit Montgomery, « l’ennemi trouvera ses lignes de repli sur la Seine déjà occupées par les Alliés et sa position deviendra intenable »[3]. Patton réagit en demandant de pouvoir lancer une tête de pont à Mantes et de progresser vers l’est, vers Melun, Fontainebleau et Sens. Bradley l’y autorisa, ce qui actait l’orientation de la 3e Armée vers la Seine en amont de Paris, et donc le passage des opérations en aval sous la responsabilité de la 1ère Armée de Hodges.
De la côte à Dreux, l’ensemble du front allié doit s’ébranler vers la Seine, dans une région coupée par les profondes vallées de petites rivières, la Touques et la Risle. A gauche, la 1ère Armée canadienne engage le 1er Corps britannique, avec deux divisions d’infanterie, la 6e Division parachutiste, en position défensive depuis le 6 juin, et la 7e DB britannique. Au centre, le 2e Corps canadien, avec 2 divisions d’infanterie et la 4e DB, doit aller de Vimoutiers, Orbec, Bernay, Bourtheroulde, en direction de Rouen et Elbeuf.
A droite, le XXXe Corps, de la Deuxième Armée britannique, doit obliquer vers l’est, vers Le Neubourg et Louviers, pour passer la Seine dans un secteur libéré par les Américains.
Bradley a décidé d’engager le XIXe Corps, avec les 28e et 30e DI et la 2e DB US vers Evreux, pour remonter ensuite sur Louviers par la rive gauche de l’Eure, en complément du XVe Corps, venant de la 3e armée avec la 79e DI et la 5e DB, qui doit progresser parallèlement, entre l’Eure et la Seine. L’ensemble constitue un total impressionnant de 9 Divisions d’infanterie, cinq divisions blindées et une division parachutiste.
Initiée le 17 août par le Ier Corps britannique, avec l’opération Paddle, l’offensive alliée se heurte à une résistance allemande habile, même si le moral des unités commence à être affecté par la situation[4]. La prise de Lisieux donne lieu à deux jours de combats intenses, alors que l’obstacle aurait peut-être pu être contourné. La Risle, dernier obstacle majeur, est atteinte entre le 24 et le 26 selon les secteurs.
Anglais et Canadiens atteignent la ligne Louviers-Elbeuf le 26 août, retardés par la défense allemande, mais ce n’est pas leur rythme de progression qui était important pour le succès de la manœuvre alliée.
L’offensive laborieuse des XVe et XIXe Corps US
Le 17 août, Patton avait donné l’ordre à Haislip, commandant du XVe Corps, de se diriger vers le nord, en direction de Mantes. « La 5e DB et la 79e DI, relevées à Dreux et à Nogent le Roi par la 7e DB se déplacèrent facilement jusqu’à Mantes-Gassicourt, le 18 août, établirent des barrages pour ramasser les trainards allemands et installèrent des tirs d’artillerie pour interdire tous les sites de traversée du fleuve. Le lendemain, une formation de la 79e DI entrait à Mantes et s’aperçut que les Allemands étaient partis »[5]. Dans la nuit du19, les hommes du 313e Régiment d’infanterie traversent la passerelle du barrage de Méricourt. Le lendemain, un pont de bateaux est installé entre Rosny-sur-Seine et Guernes, permettant le passage du reste de la division avec ses chars d’accompagnement et son artillerie. La 79e DI s’emparait même du poste de commandement du groupe d’armées B, à La Roche-Guyon « en envoyant les soldats du quartier-général allemand s’échapper en débandade à l’est, jusqu’à Soissons »[6].
Il faut attendre le 22 pour que Patton, qui avait fait le 20 une visite symbolique pour « pisser dans la Seine », réalise pleinement les potentialités de la tête de pont. « Il m’est venu à l’idée que nous devons aller vers le nord plutôt que vers l’est […] En prenant la direction de Beauvais (ce que le XVe Corps peut très bien faire), passer la Seine à Mantes et lui rester parallèle pour l’ouvrir aux Britanniques et aux Canadiens. Le ravitaillement nous parviendra par Mantes, ce qui réduira de 50% la consommation actuelle. C’est la meilleure idée stratégique que j’ai jamais eue. Je l’ai envoyé à Allen [chef d’état-major de Bradley] Si Bradley l’approuve, il n’aura qu’à me télégraphier ‘’Plan A’’»[7]. Malheureusement, il était trop tard et la tête de pont de Mantes devait rester inexploitée, les Alliés ayant décidé le 19 de progresser sur la rive gauche de la Seine. Cela ne signifie pas qu’elle fût inutile. Réalisant en effet le risque qu’elle représentait, Model engage l’essentiel de ses réserves pour la réduire. La Luftwaffe est particulièrement sollicitée, multipliant les raids au prix d’une cinquantaine d’appareils pour des résultats négligeables, excepté de faire la démonstration de l’efficacité de la DCA américaine. Les assauts menés, sous la conduite du 1er Panzerkorps SS, du 21 au 27, ne parviennent pas plus à entamer les lignes de la 79e DI US, qui démontre un réel savoir-faire tactique, en particulier dans l’utilisation de son artillerie.
Conformément au plan, la 5e DB s’était dirigée sur Louviers, en progressant entre Seine et Eure. Elle devait se heurter à la résistance opiniâtre de groupes de combat, regroupant des éléments de diverses Panzerdivisionen. « Une vingtaine de kilomètres au-delà de Mantes, un groupe de combat composé d’éléments épars de diverses divisions de Panzer, commandé par le Standartenführer Mohnke de la Hitlerjugend, oppose une résistance farouche à la 5e DB. Il faudra à celle-ci cinq jours de combats acharnés pour franchir les 30 kilomètres qui mènent à Louviers »[8].
Elle fut rejointe par les unités du XIXe Corps, de la 1ère Armée, progressant sur un terrain plus favorable, à l’ouest de l’Eure. Au moment où l’action combinée des unités attaquant selon ces deux axes allait réussir à s’emparer de Louviers, menaçant ainsi les itinéraires de repli allemand dans la région de Pont-de-l’Arche, ces unités reçurent l’ordre de se retirer pour libérer le passage au XXXe Corps britannique, conformément à l’accord interallié, à l’heureuse surprise des défenseurs qui pouvaient ainsi procéder à leur propre repli. Alors, « comme pour consacrer leur victoire face à la poussée américaine, les Allemands font sauter les ponts de l’Eure devant Louviers endormi ; le grand mouvement de faux rêvé par Bradley -de Chartres à Vernon, et de Vernon à Honfleur ce soir [du 25août] libéré par l’ouest- et qui devait doubler la récolte engrangée dans la poche de Falaise est remisé dans les dossiers ; il n’y aura pas de second Stalingrad en Normandie »[9].
La résistance allemande
Force est de constater l’efficacité de la résistance opposée par les Allemands à l’offensive alliée, malgré la disproportion des forces. Le 20 août, en effet, il restait à Model :
-au sud de la Seine, 170 à 180 000 hommes, dont environ 120 000 hommes de la 5e Panzerarmee, avec une quarantaine de chars et de 45 000 à 65 000 hommes de la 7e Armée, pour l’essentiel rescapés de la poche de Falaise, avec également une quarantaine de chars;
-Au nord de la Seine, environ 123 000 de la 15e Armée, échelonnés du Havre à l’Escaut, dont 26 000 seulement aux trois divisions en marche vers la Seine et rapidement disponibles pour défendre la rive nord du fleuve[10].
Les difficultés de progression de la 5e DB entre Seine et Eure illustrent la résilience de l’armée allemande dans des conditions particulièrement difficiles. Pour certains auteurs, ces difficultés illustrent aussi les limites des unités américaines, y compris de la méthode Patton quand elle se heurte à une opposition déterminée sur un terrain offrant peu d’espace à la manœuvre. Comme pourra l’écrire Russell Weigley, « quand la 3e Armée ne pouvait pas contourner l’opposition, ses résultats n’étaient pas aussi impressionnants que sa performance de progression sur une voie ouverte »[11].
C’est seulement le 25 que la 5e Panzerarmee reçoit l’ordre de retraite au nord de la Seine, à effectuer « en un mouvement rapide, dans la nuit du 26 au 27 »[12]. Le 27, une arrière-garde appartenant à 3 divisions d’infanterie, soutenue par 23 chars et 60 pièces d’artillerie couvrait les derniers transbordements dans les boucles de la Seine de Caudebec, Duclair et Rouen[13]. La plupart de ces hommes allaient encore s’échapper, toutefois sans véhicules et avec seulement leurs armes individuelles.
Un bilan décevant pour les Alliés, ou « d’un Dunkerque sur la Seine »
Certes élevée, l’estimation des pertes allemandes entre la clôture de la poche de Falaise et la traversée de la Seine ne manque cependant pas d’étonner. Le premier, Michel Dufresne a exploité une enquête de l’Unité d’analyse du Bomber command chargée d’établir « dans quelle mesure la Seine avait constitué un obstacle pour les forces allemandes en retraite, soumises au feu de l’aviation»[14]. Sur 320 000 hommes présents le 20 août, 240 000 arrivèrent à la Seine, qu’ils franchirent pratiquement tous. Ce sont donc les trois quarts des effectifs allemands qui devaient échapper au «grand enveloppement ». Les Alliés devaient retrouver ces hommes, aguerris par cette dure expérience, en face d’eux lors des batailles de l’automne et de l’hiver, dans des unités réorganisées et réarmées. Plus surprenant encore, compte tenu des conditions de la retraite, les deux tiers des véhicules furent évacués, soient de 26 à 31 000 sur un total de 40 à 45 000, dont 30 à 35 000 atteignant la Seine. Quand on a présent à l’esprit le déficit de motorisation de la Wehrmacht, la sauvegarde de ce parc de véhicules constituait un succès essentiel. Le taux des pertes de blindés fut certes plus sévère. Sur 800 chars restant au 19 août, 195 atteignirent la Seine dont 135 la franchirent, soient seulement 17%[15]. Sur 15 000 véhicules détruits, 3960 peuvent être attribués à l’action de l’aviation, soit seulement un quart. Ce taux tombe à 2,2%, soient 15 sur 670, pour les chars, ce qui met sérieusement en question la réputation d’efficacité des roquettes antichars des Typhoons et autres Thunderbolts.
Pour ce qui concerne les matériels, la Wehrmacht de 1944 a donc fait beaucoup mieux que les British Expeditionary Forces de 1940. Si l’on retient le chiffre de 338 000 hommes évacués de Dunkerque, pour 40 000 Français restant au 4 juin, soient 90% des présents, ce résultat est également inférieur à celui obtenu sur la Seine par les Allemands.
Les unités évacuées de Normandie, plus ou moins réarmées et recomplétées, devaient constituer l’ossature de la défense allemande de l’ouest dans les mois à venir. Au 30 août, sur 20 divisions formant un front fragile de la Somme aux Ardennes, 12 étaient rescapées de Normandie[16].
Si cette expression d’un « Dunkerque » en Normandie, ou sur la Seine, est relativement récente[17], elle correspond assez à la perception que s’en faisait divers historiens alliés. Pour l’Histoire officielle américaine, par exemple, des milliers d’Allemands se sont échappés de la poche « mais ceux qui ont réussi à passer la Seine l’on fait comme le BEF à Dunkerque, sans leur équipement et avec guère plus que leur armes personnelles »[18].
Curieusement, cette image d’un Dunkerque qui parait à nos yeux l’expression d’un succès allemand était partagée par Montgomery, avec la perception inverse, comme il l’écrivait dès le 18 août à Alan Brooke : « Toutes les formations allemandes qui franchiront la Seine seront tout à fait incapables de combattre au cours des mois à venir », une idée reprise par son biographe et avocat, Alistair Horne, pour qui les Allemands « qui ont traversé la Seine l’ont fait comme le BEF à Dunkerque, sans leur équipement lourd et avec guère plus que leur arme personnelle »[19]. Puisque le fait d’avoir acculé les Allemands à un Dunkerque inversé lavait la honte de mai 1940, pourquoi se reprocher d’avoir laissé passer, pour la deuxième fois en deux semaines, l’occasion de réussir un Stalingrad ?
Les témoignages allemands sont plus catégoriques, comme celui du général Eberbach, ancien commandant de la 5e Panzerarmee, qui déclarait 45 ans plus tard : « je ne comprends toujours pas, aujourd’hui, que les Alliés ne nous aient pas écrasés sur la Seine »[20].
Le dispositif de franchissement allemand, clé d’un « Dunkerque sur la Seine »
Les Alliés, et Montgomery en premier, s’imaginaient que la destruction de pratiquement tous les ponts permanents priverait les Allemands de toute possibilité de retraite organisée. Portant, avons-nous vu, en moins d’une semaine, ce ne sont pas moins de 240 000 hommes et 30 000 véhicules qui échappèrent à l’emprise alliée en traversant la Seine par des dizaines de points de passage de nature variée et d’importance très inégale.
Longtemps méconnu, le plus remarquable de ces points était le pont de bateaux du Bas de Poses, près de Pont de L’Arche.
« Ce pont était formé de deux éléments, chacun étant établi sur un bras du fleuve. Les éléments étaient amarrés le long des berges lorsque le pont était hors service. Les manœuvres de conversion étaient réalisées en 15 minutes au moyen de bateaux à moteur. Du 19 au 24 août, ce pont fut utilisé pendant 72 heures [il resta utilisable malgré deux bombardements, les 23 et 24] Le 25, à 20h30, les Allemands le sabordèrent ainsi que la digue située en aval. D’après les témoignages locaux, il avait permis d’évacuer 16 000 véhicules »[21], ainsi que de 100 000 hommes[22]. A Rouen, le pont de chemin de fer, lourdement endommagé mais réparé par un bataillon du génie de la 21e PzD, allait également offrir d’importantes possibilités de franchissement[23].
Les Allemands devaient utiliser les nombreux bacs, qui constituaient déjà en temps de paix un complément des ponts existant en nombre limité. Ainsi, « à Duclair [en aval de Rouen], la 9e SS PzD coordonne le passage de 3500 véhicules grâce à un gros bac à vapeur capable de charger 12 camions, de 1500 véhicules à l’aide d’un petit bac auxiliaire à moteur ainsi que de 700 via un bac à rame artisanal. 5700 véhicules sauvés, plus que de véhicules perdus dans le couloir de la mort de Falaise et sur un seul site de franchissement »[24]. D’autres bacs fonctionnaient à La Mailleraye et Caudebec en Caux. En tout, on estime à 60 le nombre des points de passage utilisés pour assurer la traversée de la Seine par les unités des 5e et 7e armées.
Les limites de l’action alliée
Du côté allié, Dufresne met en cause un triptyque : « trop peu, trop près, trop tard »[25], ajoutant aux traditionnels facteurs de retard et d’insuffisance des forces une conception défectueuse de la manœuvre.
Trop peu et trop tard, puisque c’est seulement le 20 que le XIXe Corps, alors aux environs de Flers, est envoyé par Bradley renforcer le XVe. Il « ferait 160 kilomètres en un grand mouvement de troupe compliqué » [26], alors que le XXe, de Chartres et d’Evreux, pouvait intervenir beaucoup plus rapidement. Surtout trop près, relève Dufresne : c’est là sans doute le facteur essentiel. La progression sur la rive gauche, dans un premier temps entre Eure et Seine, devait s’effectuer sur un terrain défavorable, près de la ligne de retraite des restes des Panzer Divisionen qui allaient pouvoir constituer des groupes de combat très efficaces dans l’action défensive. Apparemment plus risquée, une manœuvre par la rive droite aurait été paradoxalement plus facile en même temps que plus décisive. Le problème était que, justement, le commandement allié ne percevait pas cette opportunité d’une action décisive, comme il ressort de différents témoignages : «Monty donne pour directive d’exécuter un crochet vers le nord en vue de procéder à un nouvel encerclement sur la Seine. Bradley y consent malgré son désir de pousser vers l’Allemagne », un désir alors partagé par Patton.
Facteur important pour la réussite de la retraite, l’action de l’aviation s’est exercée bien en retrait du rythme de 1000 missions par jour effectuées en moyenne pendant la première quinzaine d’août. Du 21 au 29, ce rythme est atteint –et même dépassé-seulement le 25 août (1357 sorties) et à peine approché les 22 (781 sorties), 26 (523), 28 (448) et 24 (350). Les sorties de nuit n’interviendront qu’à trois reprises : les 26 (19 sorties), 23 (99 sorties) et 27 (59), laissant toute latitude aux mouvements allemands à partir du coucher du soleil. Comme le note Blumenson, « l’aviation alliée, non plus, ne parut pas aussi active que d’habitude pendant les jours dangereux de la retraite. Les bacs qui étaient restés en service, sur la Seine, ont fonctionné même pendant les heures du jour »[27]. Le commandant de la 353e ID devait déclarer à ses interrogateurs américains en 1946 : « Ma division n’a pas souffert pendant la traversée de la Seine. D’énormes pertes auraient pu lui être infligées »[28].
Cette faible activité aérienne s’explique largement par la météo défavorable, mais elle répond aussi à une décision de réorientation des objectifs décidée le 21 août par Leigh-Mallory, commandant des forces aériennes alliées. L’aviation alliée devait viser les dépôts dans la région de la Somme et de la Marne, les ponts de la Seine ne constituant plus des objectifs a priori[29].
Exception illustrant l’importance de cette faible activité aérienne, les bombardements de Rouen dans l’après-midi du 25, sur une ville encombrée, embouteillée de véhicules et d’hommes en attente de traversée, devaient s’avérer particulièrement destructeurs. L’interception de messages allemands faisait état d’une jetée terminée à 17 heures et détruite cinq minutes plus tard[30]. Un témoin relatera : « depuis la Place Carnot, sur plusieurs kilomètres de quai et dans les voies adjacentes, c’est un embouteillage indescriptible dont il n’est plus possible de sortir. A 19h 15, une escadrille arrive et déverse presque instantanément toute sa provision de bombes explosives et incendiaires […] Au fracas des torpilles répond le tonnerre des munitions qui explosent. [Pour qui s’aventurait dans le quartier le surlendemain, au milieu des corps et des épaves, c’était une] vision d’enfer ? non, pis que cela ! Dante n’avait rien vu qui se puisse comparer »[31].
On imagine l’effet qu’aurait produit la répétition de tels bombardements sur les différents sites de traversée.
Et si…
Nombre d’auteurs, allemands en particulier, s’accordent aujourd’hui pour penser que le projet d’un « grand enveloppement » des armées allemandes de Normandie, aurait pu réussir, s’il avait été tenté par la rive droite de la Seine plutôt que par la rive gauche.
Dès le 15 août, l’état-major allemand du front ouest avait identifié le danger d’une telle opération[32]. « La menace opérationnelle immédiate venait du XVe Corps américain attaquant vers le nord en partant de la région de Dreux. L’OB ouest en déduisit immédiatement que les Américains avaient l’intention de pousser vers la Seine, au nord-ouest de Paris, pour bloquer toute retraite aux 5e et 7e Armées. Ce faisant, ils pourraient tout de suite former une seconde poche venant juste après celle de Falaise»[33]. Le 20, Model s’inquiète particulièrement des têtes de pont américaines entre Vernon et Mantes : « Si les Américains exploitaient cette opportunité en traversant en masse sur ces sites, et s’ils devaient pousser par la rive nord vers l’embouchure, alors le destin des deux armées serait scellé »[34].
Comme l’a noté Weigley, « les Allemands estimaient qu’ils étaient si faibles sur la rive droite que cette manœuvre pourrait permettre l’encerclement des restes du groupe d’armées B, dans une débâcle pire que celle de la poche de Falaise […] Ils n’auraient pas été en mesure de mettre en danger les communications américaines sur la Seine, en particulier si un corps complet avait opéré sur la rive est »[35].
Dès le 3 août, quand le succès de la percée américaine a permis d’élargir les perspectives, « Montgomery avait envisagé, par un ‘large crochet’, d’envelopper les troupes allemandes puis de refermer la trappe au sud du fleuve. Sans enthousiasme, il s’était rallié au projet de Bradley d’un ‘crochet plus court’ visant à clore le piège à hauteur de Falaise et Argentan »[36]. Ainsi, loin de constituer une pure œuvre d’imagination, le scénario d’enveloppement par la rive droite de la Seine répond à un projet nourri aussi bien par Montgomery que par Patton, bien qu’à des moments et selon des modalités différentes.
La manœuvre du « grand enveloppement » par la rive droite de la Seine peut s’insérer dans divers scénarii contrefactuels. Sa réalisation serait certes facilitée si elle succédait à l’opération uchronique Superlord, assurant l’encerclement complet, puis la capitulation, des unités allemandes présentes dans la poche de Falaise. Son enjeu serait toutefois moindre et, comme nous l’avons vu, une combinaison de points de divergence rend plus difficile la référence au scénario réalisé qui nourrit la réflexion historique.
C’est donc un scénario contrefactuel respectant le déroulement historique des opérations de fermeture tardive et incomplète de la poche de Falaise que nous allons proposer. Le point de bifurcation se situe le 19 août, lorsque les principaux généraux alliés se réunissent pour prévoir la suite des opérations.
Lorsque Montgomery, Bradley, Dempsey, Crerar mais aussi Patton se réunissent le 19 août, une série de décisions sont rapidement arrêtées, mais un point, d’importance stratégique majeur, fait débat. Le plan visant à rechercher un enveloppement sur la Seine, à partir de Mantes sur le point d’être saisi par Haislip est validé. Montgomery et Bradley se mettent d’accord sur le principe d’un passage temporaire des divisions américaines dans le secteur du 21e groupe d’armées, à conditions que les itinéraires soient libérés pour donner à la 2e armée britannique un accès au fleuve, pour le traverser dans la région de Vernon. Bradley est conscient de la nécessité de renforcer le XVe Corps, ce qu’il fera en envoyant le XIXe Corps de la 1ère Armée sur l’Eure. Plus problématique était l’ampleur à donner au mouvement.
Une progression par la rive gauche et le long de l’Eure avait la préférence de Montgomery. Toutefois, la poussée d’Haislip au nord d’Evreux ouvrait une autre perspective et Patton avait demandé l’autorisation de conquérir une tête de pont sur la rive nord, près de Mantes[37]. Restait à décider ce que l’on en ferait. L’état-major de la 3e armée avait préparé une étude faisant ressortir les avantages d’une manœuvre par la rive droite de la Seine, remontant de Mantes à Rouen, où la présence allemande paraissait très faible et le terrain favorable. Parmi les états-majors américains, l’impression –par ailleurs injustifiée- se faisait jour que Montgomery avait compromis les chances du « petit encerclement » à Falaise. Si les divisions du XVe Corps manquaient pour boucler solidement la poche à Chambois et sur la Dives, il convenait que cette diversion comporte la plus grande efficacité envisageable. Tedder s’étant chargé de relayer l’idée auprès d’Eisenhower, celui-ci avait demandé à Bradley de regarder de près cette possibilité d’adopter un plan pouvant conduire à des résultats plus décisifs. C’est dans ces conditions que fut adopté le principe d’une manœuvre par la rive droite, qui devait recevoir le nom, à la signification bien transparente, d’Opération Harvest.
L’opération Harvest
Les buts de l’opération Harvest[38] étaient ainsi définis :
1-L’encerclement du maximum d’unités des 5e et 7e Armées allemandes au sud d’une ligne délimitée par la Seine, de Mantes à Rouen, la Nationale 27, de Rouen à Dieppe ;
2-L’occupation d’une zone délimitée par la Somme et l’Oise, jusqu’à la ligne Péronne-Noyon, ou Saint-Quentin, en vue de préparer des opérations ultérieures.
Selon les dispositions arrêtées le 19, la 3e Armée de Patton, forte des XVe, XXe et XIXe Corps, était chargée de l’établissement et de la défense de la tête de pont, puis de la poussée jusqu’à Rouen, avant de diriger un CA sur Beauvais puis Montdidier et l’Oise. La 2e Armée, de Dempsey, traverserait la zone libérée par les Américains à partir d’Evreux, pour passer la Seine à Vernon, rejoindre la région Gisors-Gournay en Bray, et poursuivre vers Dieppe par la Nationale 15, et sur sa gauche, vers Tôtes et la Nationale 14, pour fermer le périmètre d’encerclement sur la ligne Rouen-Dieppe. Dans un second temps, elle devait pousser vers Amiens et Abbeville, sécuriser la ligne de la Somme et y acquérir une ou plusieurs têtes de pont.
L’armée canadienne prendrait en charge le nettoyage de la rive gauche, avec le concours de divisions du 12e Corps britannique, avant de s’intégrer au dispositif allié de la rive droite, face au Havre.
La part américaine de l’opération se trouvait ainsi dévolue à la 3e Armée. Patton ne voyait pas sans regrets s’éloigner la perspective qu’il caressait de conduire la charge, entre Paris et Orléans, vers le Luxembourg et la Sarre, mais il ne pouvait refuser de saisir l’occasion d’être l’acteur principal du « grand enveloppement », une belle revanche sur l’ordre d’arrêt qui lui avait interdit, pensait-il, de réaliser l’encerclement des armées allemandes entre Argentan et Falaise.
L’opération Harvest risquait certes de mettre à mal la susceptibilité américaine. Il était difficile en effet de dénier à Montgomery le contrôle de l’opération, même si l’on évitait le rattachement formel de la 3e Armée au 21e Groupe d’armées. De plus, soumettre Patton à la coordination de Monty promettait d’être explosif. En même temps, plus que tout autre général américain, Patton saurait imprimer son image et imposer pour le public américain l’idée que la victoire décisive clôturant la bataille de Normandie constituait bien un succès yankee.
Les travaux préparatoires avaient dégagé la nécessité d’un dispositif complexe et bien réglé d’articulation des mouvements respectifs des Alliés: les unités américaines, les mieux placées devraient progresser d’est en ouest, le long de la Seine, puis dégager des itinéraires pour que les armées anglo-canadiennes traversent le fleuve afin de participer à l’offensive ultérieure, vers la Somme. Ce plan entrainait des cisaillements d’itinéraires qui devaient être soigneusement étudiés, avec une organisation scrupuleusement respectée, au risque d’entrainer une paralysie des armées alliées. Caffey, chef d’état-major de la 3e Armée, se vit confier la charge de veiller à ce qu’un défaut de coordination du mouvement des diverses grandes unités alliées ne viennent pas casser le rythme de la progression, comme cela était advenu le 12 août, entre Sées et Argentan.
L’opération Harvest ne devait pas se dérouler sans quelques difficultés ponctuelles, avec cependant un succès final qui attestait de la validité de sa conception.
La 79e DI passe la Seine le 20, suivie par le Combat Command CCA de la 5e armd dans la nuit, qui s’assure dans la matinée du 21 de Magny en Vexin, où il bifurque sur la Nationale 14, en direction de Rouen. Le 22, alors qu’un détachement occupe Les Andelys, la colonne principale vient buter à l’approche de Fleury sur Andelle sur la ligne principale de défense installée à la hâte par le 2e SS PzK, pour barrer la route de Rouen. Cette position de 12 kilomètres bénéficie du profil encaissé de la vallée, d’une part, et de la proximité du pont-bateaux de Poses, à la fois site à protéger et source d’un flux régulier d’hommes et de véhicules qui peuvent être agrégés aux noyaux d’unités en train de prendre position. Heureusement pour les hommes d’Haislip, ces unités largement improvisées manquent de cohérence et d’armement lourd. En particulier, la dizaine de chars Panther qui a traversé dans la nuit, retardée par des problèmes mécaniques, n’atteindra le secteur de Romilly que dans la soirée du 23, trop tard pour peser sur la décision. Le temps pluvieux, interdisant les soutiens aériens, favorisait la tâche des défenseurs.
Son attaque frontale le long de la N14 ayant été repoussée avec des pertes sérieuses, la 5e DB cherche à contourner ce point fort par Charleval, sans plus de succès d’abord. Il faudra monter une attaque en règle, avec le concours de fantassins du 60e Régiment d’infanterie de la 5e DI, pour percer la mince ligne de résistance allemande et déboucher en terrain libre, sur la Nationale, vers Rouen. Loin d’être achevés, les combats dits bataille de l’Andelle se poursuivent toute la journée du 24, pour achever le nettoyage de la vallée, jusqu’à Pitres, face au pont de Poses. Ces deux jours d’affrontement provoqueront à eux-seuls plus de la moitié des pertes américaines de l’opération Harvest.
Pendant que les combats se poursuivent sur l’Andelle, la 5e DB reprend sa progression rapide vers Rouen, atteignant dans l’après –midi du 24 Franqueville Saint-Pierre, d’où elle se dirige en deux colonnes, l’une vers Darnetal, interceptant la route nationale 30, vers Gournay en Bray, l’autre vers Belbeuf et ses hauteurs, face à Saint-Etienne du Rouvray. Dès la soirée, ses Shermans et TD M10, ainsi que deux batteries d’automoteurs de 105 HM7, sont en mesure de prendre sous leur feu différents objectifs en ville, dont surtout le viaduc ferroviaire d’Eauplet dont la traversée devient très risquée, puis impossible par suite de dégâts apportés au revêtement provisoire. Le 25 voit se consolider les positions américaines, dont l’artillerie peut tirer sur l’ensemble de la ville, bénéficiant d’excellents observatoires et de la collaboration de FFI qui lui signale les objectifs intéressants. Au passage, une colonne prend le contrôle de l’aérodrome de Boos, évacué en hâte par la Luftwaffe, et ouvert dès le 25 aux Piper d’observation et de liaison, ce qui permet à Patton de venir contempler Rouen le lendemain. Le 26, avec des renforts d’infanterie arrivés dans la nuit, le XVe Corps achève l’investissement de la ville au nord, coupant les routes de Neufchatel et de Dieppe, puis la N182, vers Duclair et Barentin vers l’ouest, avant d’entreprendre dans la soirée, guidée par des FFI, le nettoyage des quartiers de la rive nord. Les colonnes allemandes, qui trouvent la traversée interdite à Rouen et en amont, se pressent pour franchir la Seine par les bacs de Duclair, Caudebec et Quillebeuf, tandis que l’aviation alliée, très active avec le retour du beau temps le 25, peut concentrer ses attaques un périmètre restreint.
Autre point chaud de l’opération, la ligne défensive de la 79e DI, couvrant la route de Mantes à Magny en Vexin, contre laquelle le commandement allemand dirige les efforts d’un groupement de forces réunies à la hâte, y compris au détriment de la défense du Gross Paris. Ayant cédé sa 5e DI à Haislip, le XXe Corps prend en charge le 23 les opérations dans ce secteur, sa 2e DB venant à l’appui de la 79e DI, d’abord en soutien, puis en contrattaque pour se ‘donner de l’air’ en direction de l’Oise.
Sur la rive gauche, Patton engage la 7e DI, rapidement disponible, dans une offensive entre Seine et Eure avec un double objectif : sécuriser la ligne Vernon-Pacy sur Eure, pour dégager le passage prévu de la 2e armée britannique, ce qui assure en outre la couverture du flanc gauche de la3e armée, et , en engageant un mouvement menaçant en direction de Louviers, obliger les Allemands à disperser leurs moyens entre les deux rives.
Pendant ce temps, les Anglais du XXXe Corps ont passé la Seine à partir le 24, atteignant Gournay en Bray le 25, Forges-Les Eaux le 26 et Dieppe, où la 11e DB entre le 27, s’étant adjoint pour l’occasion le 14 th Canadian Hussars, régiment de reconnaissance de la 3e DI canadienne[39], ainsi associée à la revanche sur la tragique journée du 19 août 1942. Le port, aux destructions nombreuses mais superficielles, vient rapidement soulager la logistique très tendue du 21e groupe d’armées. Entre Rouen et Dieppe, une ligne d’arrêt rapidement étoffée vient interdire le passage, ne laissant aux dernières unités allemandes parvenues à traverser la Seine d’autre issue que la captivité ou le repli sur Le Havre.
Dernière étape de l’opération Harvest, la course à la Somme, avec la prise d’Amiens par la 7e DB britannique le 29, tandis que le XXe Corps américain s’assurait de Beauvais le 25, de Montdidier le 27, avant de s’arrêter sur ordre à Noyon le 28. Le XIXe Corps avait pour sa part pris en charge le terrain jusqu’à l’Oise et sécurisé le 26 le site d’installation d’un nouveau pont entre Les Mureaux et Meulan, afin d’élargir les voies de communication de la 3e armée en vue des étapes futures de son offensive.
Certes, des dizaines de milliers d’Allemands avaient traversé la Seine avant l’occupation de la rive droite. Malgré cela, le succès d’Harvest était considérable. Sur 240 000 hommes atteignant la Seine, une centaine de milliers seulement devait avoir franchi le 1er septembre la ligne de la Somme et de l’Oise, disponibles pour contribuer à la reconstitution des unités de la Wehrmacht, des SS ou de la Luftwaffe[40]. On comptait alors une centaine de milliers de prisonniers, mais aussi près de 40 000 venus s’agglomérer aux défenseurs de la Festung Le Havre, où ils constituaient autant un poids mort qu’une ressource pour le commandement de la place.
Le cours de la guerre allait en être changé.
Notes et Références
[1] Jean Quellien, La bataille de Normandie, 6 juin-25 août 1944, 80 jours en enfer, p. 361.
[2] M. Dufresne, Normandie août 1944, Heurs et malheurs d’une fin de campagne, septembre 1987, p. 115 ; N. Aubin, La course au Rhin (25 juillet-15 décembre 1944), Pourquoi la guerre ne s’est pas finie à Noël, p.111.
[3]Aubin, ibid.
[4]E. Florentin est l’auteur d’un ouvrage de référence, La poursuite, Opération Paddle, qui rend compte de l’intensité des combats.
[5] M. Blumenson, Breakout and Pursuit, Histoire officielle américaine, traduite sous le titre : La libération, p. 797.
[6] Ibid., p.799.
[7] Carnets secrets du Général Patton, p. 308 ; cf. aussi Rondeau : Patton, la chevauchée héroïque, p. 378. .
[8] Quellien, op. cité, p. 373.
[9] E. Florentin, La Rückmarsch, p. 674. Florentin a popularisé l’expression, inappropriée avons-nous vu, dans son ouvrage éponyme.
[10] Dufresne, Heurs et malheurs d’une fin de campagne, Revue Historique des Armées, septembre 1987, p. 114 ; N. Aubin, La course au Rhin, p. 116.
[11] Eisenhower’s Lieutenants, p. 244.
[12] Johachim Ludewig, Rückzug, The German Retreat from France, 1944, p. 161.
[13] Ibid. p. 162.
[14] Dans un article au titre révélateur, Le succès allemand sur la Seine, Revue Historique des Armées, septembre 1989, p. 49.
[15] Ces évaluations sont données dans l’article précité de Michel Dufresne, p. 55.
[16] Dufresne, Heurs et malheurs…, p. 117.
[17] Jean Quellien, La bataille de Normandie, p. 361.Nicolas Aubin titre le paragraphe relatant cette phase des opérations : « Dunkerque sur Seine », op. cité, p. 129.
[18] Blumenson, La libération, p. 249.
[19] A. Horne, The Lonely Leader, Monty 1944-1945, p. 249 ; cf. aussi A. Capet, Montgomery, p. 277.
[20] Cité par M. Dufresne, art. cité, p. 49.
[21] Dufresne, Le succès allemand sur la Seine, RHA 1989, p. 57.
[22] Dufresne, ibid., qui fournit aussi une carte des sites de franchissement allemands, dont nous reproduisons ci-dessous la partie centrale.
[23] Florentin, La Rückmarsch, p. 676.
[24] N. Aubin, op. cité, p. 132.
[25] Dufresne, art. cité, p. 49.
[26] Blumenson, La libération, p.802.
[27] La libération, p. 811.
[28] Cité par Florentin, La Rückmarsch, p. 679.
[29] Dufresne, art. cité, p. 51.
[30] R. Bennett, Ultra in the West, p. 138.
[31] G. Pailhès, Rouen et sa région pendant la guerre 1939-1945, via Gallica, p. 242.
[32] Weigley, op. cité, p. 246.
[33] Ludewig, Rückzug, p.95.
[34] Ludewig, op. cité, p. 122.
[35]Weigley, op. cité, p. 246.
[36] Quellien, op. cité, p. 364.
[37] Nous résumons ici les décisions OTL -effectivement actées-à cette réunion, toutefois en l’absence de Patton. cf. Blumenson, op. cité, p.798 .
[38] Opération purement uchronique, rappelons-le au lecteur.
[39] C.P.Stacey, Canada’s Battle in Normandy, p. 152.
[40] Evaluation correspondant à environ 40% du nombre historiquement réalisé.
« La retraite allemande sur la Seine partage le statut ambigu de l’évacuation de Dieppe. »
L’évacuation de Dunkerque plutôt non ?
Merci pour cette uchronie dans une région que je connais très bien, étant natif de Dieppe.
Merci de m’avoir signalé cette boulette, que j’ai corrigée de suite.
Bonjour,
Une conséquence et non des moindres du succès de votre opération uchronique Harvest aurait été de redéployer les armées américaines. Au lieu d’avoir de gauche à droite, le groupe d’armées britanniques, la 1ere armée de Hodges orientée pour une avance vers la Ruhr et la 3e de Patton en position pour marcher vers la Lorraine et la Sarre, on aurait eu à la fin de l’enveloppement un dispositif avec le groupe d’armée de Monty toujours le long du littoral mais avec Patton immédiatement à sa droite. Eisenhower aurait alors pu bien plus facilement mettre en oeuvre son plan de poussée principale en direction de la Ruhr via Aix-la-Chapelle avec Patton en pointe assisté par les Anglais (affectés à la libération d’Anvers et Rotterdam ou à un remake de Market garden pour étirer le front allemand vers le nord ce qui aurait soulagé d’autant la poussée principale faite par Patton). Nul doute que le talent tactique de l’Américain, le fait qu’il soit prioritaire en ravitaillement (Ike pouvant immobiliser Hodges dans l’est de la France sans risquer le scandale) conjugué à un ennemi affaibli car saigné à mort par l’encerclement sur la Seine auraient peut-être permis d’atteindre la Ruhr, poumon économique de l’Allemagne dès septembre. Les conditions qui ont amené certains de ses subordonnés à être déloyaux historiquement (tel Bradley) et à pervertir ses ordres en septembre n’auraient pas été réunies. Vous avez bien raison de dire que le cours de la guerre en aurait été changé (même si à décharge on pourra arguer que tous les renforts allemands, en particulier la masse des nouvelles Panzer-Brigaden auraient dans ce scénario pu se concentrer dans la région d’Aix-la-Chapelle contre la pointe Patton).
Cordialement
Nicolas Aubin
Certes, c’est un peu ce que je suggèrais. Le champ des contrefactuels ouverts par Harvest et/ou Superlord est vaste.
Vous avez raison d’évoquer ce que j’appelle les contrefactuels du second ordre: comment Hitler aurait-il réagi? Le redéploiement de ses moyens vers le nord aurait permis à Hodges, en charge de la poussée vers la Sarre, de progresser malgré la réduction de ses moyens par rapport à ceux dont Patton a disposé historiquement.