Un héros de légende qui a mal tourné, Christian Sarton du Jonchay : II-Les heures sombres

Engagé à 14 ans pour partir en guerre sous l’identité d’un spahi auxiliaire algérien,  devenu pilote après une grave blessure qui lui a valu une incapacité reconnue de 65%, Christian Sarton du Jonchay est associé aux succès de Caudron Renault comme aux ultimes tentatives de redressement de l’Armée de l’Air pendant l’hiver 1939-1940.

Christian du Jonchay à Villacoublay en 1931, source:henri.eisenbeis.free

Sa participation à la campagne de France lui vaudra, avec une nouvelle blessure, une onzième citation et la rosette de commandeur de la Légion d’honneur. Pourtant, après l’Armistice, du Jonchay devait s’engager dans une collaboration de plus en plus étroite avec les Allemands, au point qu’un témoin de son action décrira comme « [son] plus pénible souvenir de cette période [d’] avoir vu l’avilissement d’un homme qui avait été un authentique héros…»[1]. Contraint à l’exil à la libération, condamné à mort par contumace, CSDJ[2] devait bénéficier d’une mesure d’amnistie en 1959.

Après avoir rendu compte dans une contribution précédente du parcours de « ce héros de légende », il nous faut revisiter cette période où « il a mal tourné», en nous attachant d’abord au collaborateur, puis au proscrit.

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Le Dewoitine 520, un grand chasseur qui revenait de loin

 « Meilleur chasseur de l’aviation française en 1940 »[1], tel est le titre indiscuté du Dewoitine 520. A quoi l’on ajoute avec raison : arrivé trop tard, en trop petit nombre. Certes, mais on sait moins que cet appareil performant revenait de loin. Au printemps 1937, Émile Dewoitine est un constructeur en faillite, aux usines particulièrement mal équipées, à la réputation mise en cause par l’échec du D513, par les accidents ayant affecté ses trimoteurs mais aussi par son implication dans les troubles qui ont déstabilisé Latécoère depuis un an.

L’histoire du Dewoitine 520 a fait l’objet de nombreuses publications. Les difficultés rencontrées dans la mise au point de l’appareil n’y sont pas occultées. On y voit  rarement abordé le paradoxe d’une réussite industrielle, obtenue par un avionneur réputé se désintéresser de la production, dans la société initialement la moins bien équipée des nationalisées de 1936-1937. Pourtant, l’histoire du Dewoitine 520 mérite d’être revisitée à l’aune des défis qu’il fallut surmonter pour que l’Armée de l’Air disposât de ce chasseur à succès, mais qui revenait de loin. Continuer la lecture